L’histoire de la construction du Canal des Pangalanes (Madagascar)

Publié par acaciasbungalows le

Tout d’abord, le Canal des Pangalanes c’est quoi? Et bien “Pangalanes” c’est le nom donné à l’enchaînement de lagunes et de lacs qui s’allongent sur toute la côte Est de Tamatave (Toamasina) à Farafangana. A la base les lacs et rivières n’étaient pas nécessairement connectés entre eux, mais à la fin du XIXème siècle, les premiers travaux effectués pendant la colonisation ont marqué la naissance du canal.

Avant ça il fallait parcourir à pied les 300km qui séparent Tamatave et Tananarive. Avec un peu de chance (et du sang de noble) vous pouviez éventuellement être transporté en filanzana, ou chaise à porteur, un “moyen de transport” qui consiste en une assise montée sur deux brancards soulevée par 4 porteurs.

Photo ancienne d'une femme sur chaise à porteurs ou filanzana
Photographie d’une ramatoa ou “dame” en filanzana. Source: Musée virtuel des Arts de l’Océan Indien

Avec plus de 600km (un peu plus long qu’un Paris – Brest), le Canal des Pangalanes est le plus long canal du monde, en effet il est 4 fois plus long que le Canal de Suez et 8 fois plus long que le Canal de Panama. Mais comme vous le savez ce n’est pas la taille qui compte mais plutôt comment on s’en sert, et malheureusement plus grand monde ne se sert du Canal des Pangalanes. En effet une bonne partie du canal est devenue impraticable à cause de plusieurs zones ensablées et de l’invasion des jacinthes d’eau.

Ironiquement c’est aussi cette foisonnante nature aquatique qui procure au canal un charme unique et qui attire chaque année les touristes désireux de s’éloigner des sentiers battus. Notre hôtel situé à Manambato offre la possibilité de découvrir ces paysages uniques dans le confort d’un bungalow éco-conçu ou au fil de l’eau grâce à notre camping-boat Heliconia.

Afin de vous préparer à saisir pleinement l’ampleur historique du Canal des Pangalanes, nous avons donc dédié cet article à l’histoire du Canal des Pangalanes depuis sa création jusqu’à nos jours.

Le Canal des Pangalanes avant l’arrivée des colons – L’impulsion de Radama 1er

Depuis l’arrivée des premières tribus austronésiennes à Madagascar, presque 2000 av. J-C, jusqu’à l’avènement du roi Radama 1er en 1810, l’île demeure un espace divisé en plusieurs royaumes et villages indépendants. Avec le soutien de l’armée britannique, Radama réussit à conquérir la majorité du pays et assoie définitivement Antananarivo en tant que centre politique et économique de Madagascar.

Portrait de Radama 1er
Portrait de Radama 1er par Victor Adam

Ainsi les premiers travaux à destination du Canal des Pangalanes ont pour but de faciliter les échanges entre la capitale et les villages de provinces récemment conquis. Cependant le manque de volonté des populations dominées participent à lenteur des travaux.

L’arrivée des colons marque la naissance du Canal des Pangalanes – Tamatave à Vatomandry

A partir de 1883 débute l’invasion française de Madagascar et elle prend fin en 1896 après la conquête de la capitale Antananarivo. Le général Joseph Gallieni est nommé gouverneur de Madagascar et c’est à son initiative que le Canal des Pangalanes voit le jour.

Le Général Gallieni porté en filanzana traversant le Canal des Pangalanes
Le Général Gallieni porté en filanzana traversant le Canal des Pangalanes
Illustration extraite de: Louis Brunet, L’œuvre de la France à Madagascar; la conquête – l’organisation – le général Gallieni, Paris, Challamel, 1903.

La construction du Canal a pour principal objectif de faciliter les échanges entre le port de Tamatave et la capitale mais aussi de pouvoir exporter plus facilement les produits agricoles de la région qui est particulièrement fertile (girofle, café, poivre, vanille, canne à sucre, fruits tropicaux…). Avant la construction du Canal, le transport de marchandises n’est possible que par dos d’hommes via l’intérieur des terres car c’est presque impossible de naviguer le long de la côte Est face au tumulte de l’Océan Indien.

Ancienne carte postale illustrant les travaux de percement du Canal des Pangalanes
Ancienne carte postale illustrant les travaux de percement du Canal des Pangalanes (1903)

Le premier tronçon du Canal des Pangalanes est donc tracé entre Tamatave et Andevoranto (distance de 95km). Le général Gallieni fait usage du “régime de l’indigénat”, une forme institutionnalisée du travail forcé, pour contraindre les malgaches à travailler sans relâche de 1897 à 1901. Ils creusent le Canal à l’aide de coupe-coupe et pelles afin de connecter entre eux les nombreux lacs et rivières.

Photo du percement d'un tronçon du canal des Pangalanes presque finalisé
Photo du percement d’un tronçon du canal des Pangalanes presque finalisé
Extrait du documentaire Arte: À Madagascar, l’envoûtant canal de Pangalanes

Il existe peu de traces de ces travaux forcés et du nombre de victimes qui ont péri dans la réalisation de ces travaux titanesques à part la myriade de niaoulis qui ont été importés d’Australie pour maintenir les berges du Canal. Ces niaoulis ont aujourd’hui proliféré et ils font partie du paysage si distinctif de la côte Est. Les travaux continueront jusqu’en 1904 pour atteindre Vatomandry, le canal est alors déjà long de 155km.

Extension du Canal des Pangalanes jusqu’à Farafangana dans les années 50

Peu après la construction du premier tronçon du Canal des Pangalanes, c’est la construction de la ligne ferroviaire entre la capitale d’Antananarivo et Tamatave qui est initiée dès 1901 et se terminera en 1913. Lorsque la ligne ferroviaire est achevée l’utilité du Canal des Pangalanes est peu à peu délaissée au profit du train qui assure le direct entre Tana et Tamatave. Cependant il ne meurt pas complètement car il reste le moyen privilégié pour accéder à certains villages enclavés (même et surtout aujourd’hui)

Illustrations des travaux de chemins de fer de Madagascar
Illustrations des travaux de chemins de fer
Image extraite de: Louis Brunet, L’œuvre de la France à Madagascar: la conquête – l’organisation – le général Gallieni, Paris, Challamel, 1903

Cependant l’essor et la croissance économique du pays, principalement centralisé à Antananarivo, surcharge rapidement la voie ferrée qui s’use trop rapidement. De plus beaucoup de régions très fertiles de la côte Est restent difficilement accessibles notamment toutes les régions environnant les villes de Mahanoro jusqu’à Farafangana. Les fortes intempéries que subit régulièrement la côte Est rendent les routes impraticables une bonne partie de l’année. Le transport fluvial est donc la solution retenue pour faciliter les échanges de marchandises. A partir de 1952, de grands travaux sont entrepris pour élargir le Canal entre Tamatave et Vatomandry permettant ainsi la circulation de chalands pouvant aller jusqu’à 300t sur certains tronçons. Le Canal est également prolongé de Vatomandry jusqu’à Mahanoro puis de Mahanoro jusqu’à Farafangana. Au terme des travaux, le Canal est alors long de 600km et praticable sur toute sa totalité.

Depuis l’indépendance jusqu’à aujourd’hui

Après la déclaration de l’indépendance le 26 juin 1960, le réseau routier devient peu à peu le principal moyen d’échange de marchandises et de personnes. Le train reliant Tamatave et Antananarivo jadis surexploité est à son tour délaissé. Le Canal est quant à lui laissé à l’abandon jusqu’à la fin des années 80 où il sera complètement rénové sur la partie Tamatave – Mananjary (433km).

Jadis conçu pour accueillir les gros navires de marchandises, la trop faible profondeur de certaines zones du canal et l’invasion des parties non fréquentées par les jacinthes d’eau et les nénuphars ne permet qu’aux embarcations légères de naviguer sur le Canal. Même si des travaux ont commencé en 2019, le Canal n’est à ce jour navigable que sur les portions: Tamatave-Vatomandry (155km) et Mahanoro-Mananjary (205km).

Photo d'un tronçon quasiment impraticable du Canal des Pangalanes dû au jacinthe d'eau
Photo d’un tronçon quasiment impraticable dû au jacinthe d’eau
Photo issue de tongasoa-madagascar

En dehors des principales villes accessibles par la route, le Canal reste le seul accès à la civilisation de plusieurs villages de la côte Est. La plupart des habitants vivent simplement de pêche et de culture de riz et de manioc. Petit à petit l’activité touristique se développe aussi depuis une vingtaine d’année. En effet les paysages littoraux uniques, la beauté et l’isolation des plages sont quelques trésors qu’offrent le canal aux visiteurs. L’authenticité des villageois reste imperturbable malgré les siècles et les révolutions industrielles

Nous vous proposons de vous imprégner complètement de l’histoire du Canal des Pangalanes grâce à des circuits en pirogue de 1 à plusieurs jours selon votre souhait. A bord du camping-boat Heliconia, voguez sur le canal et dormez à la belle étoile au bord des lagunes et bénéficiez du service d’un équipage qui vous est entièrement dédié.